Echophanies - recueil éd. Tarabuste


… c’est au corps l’étranger
à la voix l’étranger
à la langue l’étranger
à la parole l’étranger
à la vie à nos morts l’étranger
c’est sa nature au corps de n’avoir pas de langue
de toutes les recevoir en partage
à crédit
infini
— au hasard d’une carte, d’un territoire
faudrait rien rembourser ni gros ni petit lot
c’est à la voix l’étranger
c’est son timbre à la voix qui réclame
de librement circuler
de n’avoir pas de papiers
d’être sans à-valoir
— juste la peau pour la gravure de l’âge
juste le cœur d’en face pour s’y déposer
au risque de s’éteindre ou de se faire coffrer
c’est à sa langue l’étranger de résister veiller
d’autres langues
toutes les langues
qui sont venues, qui viennent et qui viendront
l’embrasser, la caresser, la pénétrer
— engrosser n’est pas vilain, moi-même je m’engrosse
infiniment à moi-même ma langue l’exil et l’étranger
c’est à sa parole l’étranger de faire terre, air, et feu
— et  puis l’ante déluge pour que viennent la soif du voyage, la mer et ses voiliers
au risque de l’éternel naufrage, l’un-sécurité
c’est mon corps l’étranger
ma voix l’étranger
ma langue l’étranger
ma parole l’étranger
la vie que l’on s’offre, qui se dérobe
le dur labeur, le grand travail
nos morts au creux des mots
nos mots mes hôtes                                                                                           



                                                                                                                     l’étranger

Echophanies - recueil éd. Tarabuste